Les petites choses de notre histoire.
Quatrième série
LES SŒURS BARBE ET MARIE HALLÉ
Le
journal des jésuites, à la date du 25 décembre 1665, nous apprend que Barbe
Hallé de Beauport, infestée d’un démon follet depuis cinq ou six mois, fut
amenée vers ce temps à l’hôpital de Québec pour y être traitée. Les attaques du
follet étaient tellement violentes que la nuit on faisait veiller Barbe Hallé
par une garde de son sexe et des serviteurs de l’hôpital. Un prêtre se tenait
aussi presque tout le temps auprès d’elle.
L’hystérie
n’était pas beaucoup connue à cette époque reculée. Il est plus que probable
que Barbe Hallé souffrait plutôt de crises hystériques que des attaques du
démon follet. Elle sortit de l’hôpital un an plus tard parfaitement guérie.
Mariée, le 14 novembre 1670, avec Jean Carrier,
habitant de la seigneurie de Lauzon, elle décéda le 18 juin 1696, après avoir
élevé une nombreuse famille. Ses descendants sont très nombreux dans toute la
région de Québec.
Barbe
Hallé avait une sœur, Marie Hallé, dont l’histoire est moins abracadabrante.
C’est
Marie
Hallé s’était mariée toute jeune à Joachim Girard, originaire d’Evreux, en
France, qui défrichait une terre dans le fief Saint-Jean, près de Québec.
Marie
Hallé, femme d’une rare vertu, était fort en peine les dimanches et jours de
fêtes pour faire ses dévotions. La terre de son mari était assez éloignée de
l’église et elle ne pouvait pas laisser seuls ses trois enfants dont le plus
âgé n’avait que quatre ans. Toutefois, chaque dimanche et fête, Marie Hallé
allait entendre la messe à la chapelle de Saint-Jean. Elle ne manquait pas, non
plus, d’assister à toutes les réunions de la Confrérie des Dames de la
Sainte-Famille qui avaient lieu à l’église paroissiale de Québec.
Mais
ces absences faites dans un si bon but étaient extrêmement pénibles à la pauvre
femme. Elle avait tout le temps sous les yeux ses chers petits enfants laissés
seuls à la maison et qui étaient bien exposés.
Or,
le 8 juillet 1665,
« Marie
Hallé, dit la Relation, avait laissé ses enfants endormis à
« Plusieurs
personnes ont cru pieusement que
« Ce
qui rend cette opinion probable, ajoute le Père Le Mercier, rédacteur de la
Relation de 1665, est que la mère trouva la porte du logis fermée de la même
manière qu’elle l’avait laissée en sortant; qu’elle ne vit point cette femme
vêtue de blanc, qui ne faisait que sortir quand elle entrait; que toutes les
choses se sont faites dans l’ordre qu’elle avait accoutumé de les faire
elle-même; que cela ne peut être attribué à nulle personne du voisinage nu du
pays, que l’on sache; que l’enfant est dans un âge peu capable d’un mensonge de
cette nature; et qu’après tout, Dieu fait quelquefois en faveur des pauvres de
semblables merveilles. »
Cet
événement extraordinaire émut à tel point les autorités religieuses de la
Nouvelle-France qu’elles chargèrent un ecclésiastique très vertueux d’en faire
une information exacte. Cette enquête n’a malheureusement pas été conservée.
(Voir pages 9-12)