MAILLOU (Mailloux), dit
DESMOULINS, JEAN-BAPTISTE,
maçon, entrepreneur,
architecte du roi, commis du grand voyer, arpenteur, né le 21 septembre 1668 à
Québec, fils de Pierre Maillou, dit
Desmoulins, sabotier, et d’Anne Delaunay, inhumé le 18 septembre 1753 dans la
crypte de l’église Notre−Dame−de−Québec.
Jean−Baptiste Maillou a dû sa réussite en
partie à son frère aîné, Joseph. Ils exercèrent tous deux le métier de maçon
mais travaillèrent chacun de leur côté, Jean−Baptiste à la construction
de l’église Saint−Charles de Charlesbourg
(1695) et Joseph au palais de l’intendant (1697) ; vers 1697, ils unirent leurs
intérêts dans une entreprise de construction et les deux associés bénéficièrent
du patronage des commerçants et des hauts fonctionnaires de Québec. Leur
connaissance des règles de l’architecture et de la décoration peut expliquer
leur succès ; dans leur bibliothèque, on retrouvait des livres tels que
Architecture, ou art de bien bastir [...] (Paris,
1572) de Vitruve, Le Premier tome de l’architecture [...] (Paris, 1567) de
Philibert Delorme, Règles des cinq ordres d’architecture [...] (Paris, 1632) de
Giacomo Barozzi, dit Il Vignola,
Les fortifications [...] (Paris, 1624) de Blaise−François
de Pagan, comte de Merveilles, L’architecture françoise
des bastimens particuliers [...] (Paris, 1624) de
Louis Savot, et aussi 17 gravures architecturales.
Certains de ces livres provenaient peut−être de la bibliothèque de l’entrepreneur−architecte Claude Baillif*, car les
mêmes titres apparaissent dans l’inventaire de sa succession. Les frères Maillou avaient été ses employés
et Baillif fut témoin lorsde la signature du premier
contrat de mariage de Jean−Baptiste ; il est mentionné comme « son amy ». Jean−Baptiste Maillou acheta la maison de Baillif sur la rue Sault−au−Matelot en 1701 et même s’il déménagea à la haute
ville vers 1720 il y conserva sa place d’affaires. Maillou fut, dans un sens, le successeur de Claude
Baillif.
La mort prématurée de
Joseph Maillou, en
décembre 1702, laissa Jean−Baptiste à la tête d’une affaire florissante.
II ne limita pas son talent à ériger des maisons particulières. À titre d’entrepreneur−constructeur il eut le contrat de
plusieurs édifices religieux : le monastère des récollets à Québec, l’église de
Saint−Laurent, île d’Orléans (1702, 1708), l’Hôpital Général à Québec
(1717) et l’église Saint−Étienne−de−Beaumont
(vers 1727). En décembre 1720, une ordonnance de l’intendant BÉGON autorisa la
construction d’une nouvelle église et d’un presbytère à Saint−Nicolas,
dans la seigneurie de Lauzon, d’après les plans de Maillou, « entrepreneur des ouvrages du Roi ». Les
archives du séminaire de Québec conservent le plan, signé par Maillou, mais non identifié,
d’une église canadienne typique. Alan Gowans a avancé
l’hypothèse qu’il pourrait s’agir du plan « d’un nouveau type général d’église
paroissiale de Québec » commandé par Mgr de Saint−Vallier [La Croix*]. Jean−Baptiste
Maillou ne
tarda pas à gagner la confiance du gouvernement de la métropole. En
1726 il reconstruisit l’étage supérieur du palais de l’intendant et en 1731 il
eut le contrat pour bâtir les voûtes de pierre du Château Saint−Louis. La
plupart des contrats que lui octroya la couronne avaient trait à des ouvrages
militaires : la restauration de la batterie de la basse ville dite « la grande
plateforme » (1702), le bastion Saint−Louis (1705-1707) et d’autres
parties des fortifications de Québec (1711), ainsi que des travaux de même
nature au fort Saint−Frédéric (Crown Point,
N.Y.) au cours des années 30. En 1724, Maillou
avait, mais sans succès, soumissionné les travaux de construction des
fortifications de Louisbourg, île Royale (île du Cap−Breton)
[V. Gédéon Catalogne*]. Le gouvernement récompensa adéquatement Maillou même si ses factures
n’étaient pas toujours acceptables. En 1719, on lui décerna le titre
honorifique d’architecte du roi. Le 6 novembre 1728, Pierre Robinau*
de Bécancour, le grand voyer, accorda à Maillou une commission afin que
celui−ci puisse remplir les fonctionsde grand
voyer dans la juridiction de Québec ; Maillou
devait le remplacer en son « absence », mais en réalité Robinau
s’en reporta à son délégué pour tout ce qui touchait la région de Québec. Maillou était nanti de
l’autorité « pour y donner les alignements des maisons sur les rues, les faire
tenir débarrassées selon les ordonnances de la voierie, empêcher qu’il n’y soit
fait aucune saillie, avances, ni anticipation sans permission de nous ou de
notre dit commis et [...] pour régler, visiter et faire entretenir les chemins
royaux de la dite ville ». En 1735, Michel Petrimoulx,
gendre de Maillou, fut
aussi nommé commis du grand voyer, vraisemblablement pour aider ou remplacer Maillou. À partir de 1702 et
jusqu’à la fin de sa vie, Maillou
fut fréquemment appelé, soit par les tribunaux, soit par des particuliers, à
mesurer et à évaluer des terrains, des maisons, des ouvrages de maçonnerie et à
dresser des plans. II exécuta des travaux d’arpentage bien qu’aucune commission
d’arpenteur n’ait été inscrite à son nom. II traça des routes rurales au
cordeau en 1717 et en 1729. II assista occasionnellement dans son travail
l’ingénieur en chef de la
Nouvelle−France, Gaspard−Joseph
CHAUSSEGROS de Léry. En 1728, en 1730 et en 1742, il
fut parmi les experts qui évaluèrent le coût des réparations à effectuer au
palais épiscopal et des transformations qui pourraient y être apportées. Après
que l’intendant Dupuy* eut publié son ordonnance sur la construction en 1727, Maillou contribua à la mise en
application des règlements au sujet des toits de bardeaux et des cheminées à
l’épreuve du feu.
Des sources diverses
témoignent de l’ascension de Jean−Baptiste Maillou dans l’échelle sociale de la Nouvelle−France.
Ses origines étaient humbles; sa première femme, Louise Phélippeaux,
qu’il épousa à Québec le 4 février 1695, était fille de tailleur et sa deuxième
femme, Marguerite Caron, avait pour père un matelot de la marine marchande ; ce
mariage eut lieu à Québec le 2 juillet 1703. Le 30 octobre 1720, l’intendant Bégon et sa femme étaient au nombre des invités à la
signature du contrat de mariage lorsque Jean−Baptiste Maillou convola en troisièmes noces avec Marie−Catherine
Amiot, dit Villeneuve, fille d’un négociant. À partir de 1723, Maillou loua un banc à la cathédrale
de Québec et, en juillet 1746, il était un des quatre «marchands et bourgeois»
notoires de Québec que les autorités consultèrent au sujet de la défense de la ville. Plusieurs
facteurs ont pu contribuer à l’ascension rapide de Maillou. Entrepreneur−maçon
compétent, il avait appris à dresser des plans et à faire de l’arpentage. Jean−Baptiste
et Joseph Maillou
possédaient une culture peu commune pour des maçons : ils possédaient tous deux
une bible, de modestes collections de récits historiques tant religieux que
profanes et des livres de piété. La dernière maison qu’ait habitée Maillou était ornée de plusieurs
gravures et peintures. Il était animé de sens civique et doué d’une belle
intelligence. Avec son frère Pierre, il se porta volontaire de 1725 à 1727 pour
s’initier au tir d’artillerie en prévision de la défense de la ville. Maillou possédait un solide sens
des affaires et il était peu enclin à prendre des risques. Il acheta des
propriétés à Québec et quelques fermes dans la région, et ces placements
témoignent de sa préférence pour les investissements d’un apport sûr et
régulier. Une de ses plus importantes acquisitions fut celle de l’ancienne
maison de René−Louis Chartier* de Lotbinière. C’était une grande maison de deux étages, à
toit en mansarde, située rue Saint−Louis, à la haute ville de Québec ; il
l’avait obtenue pour 10 000ª lors d’une vente aux enchères ordonnée par la loi. Plus tard, il la
loua à la couronne et elle servit de résidence à Chaussegros
de Léry. La maison que Maillou construisit pour lui−même sur le
terrain adjacent, en 1736, était une habitation de pierre d’un étage et
relativement modeste. C’est là qu’il mourut en 1753 ; cette maison existe
toujours mais beaucoup agrandie en largeur et en hauteur. Aucun des fils de
Jean−Baptiste Maillou ne
semble avoir manifesté d’enthousiasme pour le métier de leur père. Vital
l’exerça pendant quelques années puis se fit tavernier ; Louis−Marie se
trouvait «aux pays d’en haut pour le service du Roy » lorsque son père décéda.
Joseph fit sa marque dans la profession d’orfèvre et de marchand ; en 1723, Maillou avait dû verser une
indemnité de 500ª aux parents d’une fille que Joseph avait tuée
accidentellement. Deux des filles de Jean−Baptiste épousèrent de beaux
partis et Maillou versa
une généreuse dot pour Marie−Joseph à son entrée chez les religieuses de
l’Hôtel−Dieu. De 1707 à 1723, Jean−Baptiste avait initié à son
métier six apprentis maçons, et parmi eux Girard−Guillaume
DEGUISE, dit Flamand, Nicolas DASILVA, dit Portugais, et un Anglais du nom de Charles−Étienne Camanne. Ce
sont ces apprentis et non les propres enfants de Maillou qui marchèrent sur ses traces.
PETER N. MOOGK
AHGQ, Livres de comptes, I : 90v.˙ AN, Col., B, 47,
ff.1 247-1 259 ; Col., C11A, 59, ff.67-70 ; Col., F3, 11, ff.224s. ; Col., G3,
2 040 (on y trouve les originaux de deux actes rédigés par Claude Louet et les spécifications au sujet du travail de Maillou au fort Saint−Frédéric).˙ ANQ, Greffe de Jacques Barbel, passim ; Greffe de R.−C. Barolet,
21 sept. 1753, passim ; Greffe de Louis Chambalon, 30
janv. 1695, 12 avril 1704, 21 déc. 1705, 26 déc. 1711, 26 nov. 1715, passim ;
Greffe de J.−É. Dubreuil, 22 nov. 1723, passim ; Greffe de François Genaple de Bellefonds, 16 juin
1683, 9 janv. 1700, 5 juill. 1702, 26 juin, 29 juin, 29 août 1703,19 avril
1707, passim ; Greffe de Florent de La Cetière, passim ;
Greffe de Jean de Latour, passim ; Greffe de Claude Louet, passim ; Greffe de J.−C. Louet,
30 oct. 1720, passim ; Greffe de J.−N. Pinguet
de Vaucour, passim ; Greffe de Gilles Rageot, passim ; Greffe de Pierre Rivet Cavelier,
8 avril, 6 nov. 1713, 21 nov. 1717, passim (étant donné le nombre considérable
d’actes notariés qui touchent Maillou
soit comme partie contractante soit comme expert évaluateur, on ne peut que
citer les plus importants et indiquer où trouver les autres actes [P. N. M.]) ;
NF, Coll. de pièces jud. et not., 69, n° 2, passim.˙ APC, MG 8, B1, 20-1,
pp. 245-254 ; MG 8, BI, 25-3, pp. 1 113s., passim.˙ Archives paroissiales
de Saint−Étienne (Beaumont, Québec), Livres de comptes, I.˙ ASQ,
Polygraphie, II : 77 ; Seigneuries, VI, passim ; Seigneuries, IX, passim ;
Séminaire, XX, passim.˙ Correspondance de Vaudreuil, RAPQ, 1947-1948, 309,
326.˙ Édits ord., III : 100.˙ Jug. et délib.,
IV, V, VI, passim.˙ Recensement de Québec, 1716 (Beaudet).˙
Recensement de Québec, 1744 (RAPQ).˙ P.− V. Charland, Notre−Dame
de Québec : le nécrologe de la crypte, BRH, XX (1914) : 215, 237, 238.˙
Godbout, Nos ancêtres, RAPQ, 1951-1953, 462, 490.˙ P.−G. Roy, Inv. ins. Cons. souv., 185 ; lnv. jug. et délib., 1717-1760,
I, II, III, IV, V, passim ; Inv. ord. int., I, II,
III, passim.˙ Tanguay, Dictionnaire.˙ Gowans, Church architecture in New France.˙ P.−B.
Casgrain, Le Kent−House,
rectification historique, BRH, XIX (1913) : 11.
MAILLOUX, ALEXIS,
prêtre séculier, grand
vicaire, apôtre de la tempérance, missionnaire dans l’Illinois, né à l’Île−aux−Coudres (comté de Charlevoix) le 8 janvier 1801, fils d’Amable Mailloux et de Thècle Lajoie, décédé le 4 août 1877
à l’Île−aux−Coudres. À l’automne de 1814,
l’abbé Jérôme Demers* fait la connaissance du jeune Alexis Mailloux,
à l’Île−aux−Coudres, et lui offre, en
raison de la pauvreté de sa famille, un cours d’études gratuit au séminaire de
Québec. En mai 1825, Mgr Joseph−Octave Plessis*
lui confère le sacrement de l’ordre. L’abbé Mailloux
commence sa vie pastorale à titre de chapelain (1825-1829), puis de premier
curé (1829-1833) de Saint−Roch de Québec. Après quelques mois de desserte
à Fraserville (Rivière−du−Loup),
son évêque le réclame pour oeuvrer auprès de la jeunesse estudiantine du jeune
collège de Sainte−Anne−de−la−Pocatière
(comté de Kamouraska). Peu fait pour s’occuper
d’éducation, opposé, par tempérament, au laxisme disciplinaire et administratif
du supérieur−fondateur de l’institution, l’abbé
Charles−François Painchaud*,
il va même jusqu’à remettre en question le promitto (voeu d’obéissance à l’évêque) du sacerdoce, pour décliner
l’invitation de son supérieur. Aussi, c’est sans enthousiasme, voire même avec
la plus grande répugnance, qu’il accepte la direction du collège, poste qu’il
occupera jusqu’en 1838. Cette année−là, la mort du fondateur lui valut
d’être promu curé de Sainte−Anne et supérieur du collège parois sial.
C’est également en 1838 qu’il est nommé vicaire général du diocèse.
Durant les quelque dix
années qui suivent, sa vocation de prédicateur et d’auteur se précise. À partir
de ce moment, en effet, sa correspondance fourmille de renseignements sur ses
inquiétudes pastorales. Les maux qu’il fustige et combat sont l’ivrognerie, le
luxe, l’immoralité sous toutes ses formes, et surtout la négligence des parents
à bien éduquer leurs enfants et à les surveiller au moment des fréquentations.
Les remèdes qu’il préconise : les sociétés de tempérance, l’accroissement du
rôle des confréries ou associations pieuses, l’usage des indulgences et des
retraites paroissiales qu’il inaugure dans le diocèse. Au demeurant, c’est
l’oeuvre des retraites qui lui tient le plus à coeur, d’autant plus que la vie
sédentaire ne convient pas à sa personnalité. Durant la décennie de 1840, il
songe à se joindre aux oblats de Marie−Immaculée,
puis à fonder une société de prêtres prédicateurs dont il serait le chef, enfin
à se faire missionnaire en Colombie−Britannique ou au Saguenay. Pour
combler ses spirations,
Mgr Joseph Signay* consent finalement à le décharger
de sa cure, en 1847, pour lui permettre de se consacrer exclusivement à la
prédication dans le diocèse. Après dix années de ministère itinérant, comme
prédicateur et missionnaire colonisateur, Mailloux quitte le
Canada pour aller combattre les schismatiques chiniquistes
de l’Illinois. De retour au pays, il est curé de Saint−Bonaventure−d’Hamilton
(comté de Bonaventure), de 1863 à 1865. Par la suite, la prédication et la
rédaction d’ouvrages occupent le reste de ses jours.
Ses oeuvres écrites sont
considérables ; parmi les plus connues, citons : La croix présentée aux membres
de la Société
de tempérance ; L’ivrognerie est l’oeuvre du démon [...] ; Essai
sur le luxe et la vanité des parures [...] ; Manuel des parents
chrétiens ou devoirs des pères et des mères [...]. Ce dernier ouvrage reproduit
le contenu de ses premiers sermons de retraites. Sa diffusion et partant son
influence - la cinquième édition est de 1927 - perdurent au XXe siècle, au point
qu’en 1945 le Bulletin des recherches historiques le recommande aux foyers canadiens−français parce qu’il «est mieux adopté à
nos idées et à nos besoins». Comme c’est le cas pour l’ensemble du clergé canadien−français du xixe
siècle, la pensée du grand vicaire Mailloux s’inspire du
rigorisme mis à l’honneur par la morale janséniste. Dès lors, rien d’étonnant à
ce qu’il éprouve peu de sympathie pour son «siècle matériel et mécanique». Au
total, son enseignement est fait du rejet du monde et plus encore de la crainte
de Dieu et de l’enfer. En outre, son tempérament bouillant le fait s’emporter
dans ses prédications. En 1863, lors des quarante heures à Sainte−Claire
de Dorchester, son homélie effraya tellement les fidèles qu’un grand nombre
murmurèrent et ne voulurent pas se confesser. Aussi, Mgr Charles−François
Baillargeon* trouva−t−il
bon de lui dire un jour : « il faut se garder de l’arbitraire ; du rigorisme
qui en damne plusieurs, et ne sauve personne; de l’exagération qui [...] fausse
les consciences ; de l’excès qui trouve du péché où il n’y en à point ».
SERGE GAGNON
L’oeuvre écrite de Mailloux est
abondante ; les titres les plus connus sont : La croix présentée aux
membres de la Société de tempérance (Québec, 1850) ; Essai sur le luxe et la
vanité des parures spécialement dédié aux personnes de la campagne (Sainte−Anne−de−la−Pocatière,
Qué., 1867) ; L’ivrognerie est l’oeuvre du
démon, mais la sainte tempérance de la croix est l’oeuvre de Dieu (Québec, 1867)
; Manuel des parents chrétiens ou devoirs des pères et des mères dans
l’éducation religieuse de leurs enfants (Québec, 1851).
AAQ, Registres des lettres des évêques de Québec.˙
Archives de l’évêché de Sainte−Anne (La Pocatière,
Qué.), Paroisse de Sainte−Anne ; Collège de
Sainte−Anne (lettres originales de Mailloux pour les
années 1834-1847).˙ Archives du collège de Sainte−Anne−de−la−Pocatière
(Qué.), Fonds Alexis Mailloux
(abondante collection de documents originaux au sujet de Mailloux,
pour les années 1834-1847).˙ ASQ, Polygraphie, L, LI, LII, LIII
(correspondance de Mailloux durant son
séjour aux États−Unis).˙ Julienne Barnard, Mémoires Chapais ;
documentation, correspondance, souvenirs (4 vol., Montréal et Paris,
1961-1964), I : passim. N.−E. Dionne, Sainte−Anne de la Pocatière,
1672-1910 ; l’Île−aux−Oies, 1646-1910 («
Galerie historique », III, Québec, 1910), 82-85, 87-95, 129 ; Vie de C.−F.
Painchaud ; prêtre, curé, fondateur du collège Sainte−Anne−de−la−Pocatière
(Québec, 1894), 206-257.˙ Wilfrid Lebon, Histoire du collège Sainte−Anne−de−la−Pocatière
(2 vol., Québec, 1948-1949), 1 : 39-79.˙ Fernand Porter, L’institution
catéchistique au Canada ; deux siècles de formation religieuse, 1633-1833
(Montréal, 1949).˙ Marcel Trudel, Chiniquy (2e
éd., [Trois−Rivières], 1955).˙ Le « Manuel des parents chrétiens »,
BRH, LI (1945) : 242.
MAILLOU (Mailloux),
BENJAMIN-NICOLAS,
Prêtre catholique, né le 29 septembre 1753 à Québec, fils de
Benjamin Maillou,
forgeron, et d’Angélique Marchand ; décédé le 19 janvier 1810 à Saint−Eustache,
Bas−Canada. Benjamin−Nicolas
Maillou entre
au petit séminaire de Québec le 15 novembre 1765. Il commence ses études
théologiques en 1773, tout en exerçant la fonction de régent d’une classe du
petit séminaire. Le 21 décembre 1776, Mgr Briand* l’ordonne prêtre et, quatre
jours plus tard, le nomme curé de la paroisse de l’Immaculée−Conception
à Trois−Rivières. Nomination hâtive, car Maillou n’a pas encore 24 ans. À Trois−Rivières,
il remplace le curé démissionnaire, Isidore (Charles−Antoine) Lemire Marsolet, prêtre récollet dont la communauté desservait la
paroisse depuis 84 ans et à qui les paroissiens étaient très attachés. Aussi,
la nomination d’un prêtre séculier n’a pas l’heur de plaire, occasionnant même
des disputes partisanes, comme le souligne Mgr Briand au vicaire général de
Trois−Rivières, Pierre Carreau*, dit Saint−Onge,
au début de 1777 : « On dit que tout est en feu aux Trois−Rivières, les
uns tenant pour les prêtres, les autres pour les Récollets. » Cependant, cette
nomination était inévitable, le gouvernement britannique défendant aux
récollets de recruter des sujets ; en 1777, il restait seulement neuf prêtres
récollets, six dans l’administration des paroisses et trois formant le
personnel des couvents de Québec et de Montréal. Les paroissiens se plaignent
égale ment de la jeunesse de Maillou,
mais quand Louis−Joseph Godefroy* de Tonnancour s’en ouvre à Mgr Briand, l’évêque lui répond en
termes plutôt rudes : « il est vrai que le Sr Mailloux
est un très Jeune prêtre, mais il n’est pas moins Certain que la place que je
lui ai donnée Est très peu gracieuse, très peu ambitionnée, d’ailleurs très peu
capable de fournir aux besoins de la vie [...] Ce très Jeune prêtre n’a accepté
sans doute que parce qu’il Etait très jeune et qu’il n’osais pas refuser en
[se] montrant désobéissant, deux jours après m’avoir juré qu’il m’obéirais
[...] Si vous trouvez des Récollets, prenés en. » À
cette époque, la faiblesse de la population de la paroisse de l’Immaculée−Conception (pas plus de 800 âmes), les
difficultés occasionnées par la réparation du clocher et l’absence de
presbytère rendaient effectivement la cure peu intéressante. En même temps, Maillou reçoit la desserte de Vieilles−Forges. Une fois en fonction, son premier
souci est de bâtir un presbytère convenable et Mgr Briand offre même d’y
contribuer de sa bourse. Entre−temps, la fabrique loue une maison au prix
de 252ª par année. Le nouveau presbytère est terminé le 10 août 1783.
Faible de santé et de
tempérament plutôt flegmatique, Maillou
semble négliger passablement le ministère de la prédication, au point que Mgr
Hubert* lui répond lors d’une demande de translation de cure : « mon cher Maillou, vous y mettez obstacle
vous−même en ne prêchant point aux 3 Rivières, Surtout après vous avoir
averti de votre obligation à ce sujet. Prenez donc l’habitude d’instruire les
peuples qui vous sont confiés, et vous devez être assuré qu’alors j’entrerai
dans vos vûes. » Le 20 septembre 1790, Mgr Hubert
nomme Maillou curé
de Saint−Eustache et des dessertes voisines. Maillou éprouve une grande déception à son arrivée
dans la paroisse. Le
presbytère bâti par le père Félix Berey Des Essarts,
en 1774, est devenu à peine logeable. Maillou
habite donc dans la maison, déjà en vente, de l’ancien curé, Charles−François Perrault, qu’il doit quitter le 1er
octobre 1791. Maillou se
compare à « l’oiseau sur la branche » et accepte la suggestion des paroissiens
de demeurer dans une maison de la paroisse « en attendant un logement qui
appartient à la paroisse ». Pessimiste et légèrement neurasthénique, prétendant
qu’une «partie de la paroisse est prévenue» contre lui, Maillou lorgne la cure vacante de la paroisse Saint−Joseph
à Chambly, ce qui n’obtient pas l’agrément de Mgr Hubert. En 1792, les
paroissiens décident de pourvoir à la réparation de l’ancien presbytère, et
l’évêque va même jusqu’à conseiller à Maillou,
sans succès d’ailleurs, de se retirer soit au séminaire de Saint−Sulpice
à Montréal, soit à la mission de Lac−des−Deux−Montagnes
(Oka), jusqu’à ce qu’on lui prépare « une maison commode, décente et à la
portée de l’Église ». Le 30 juillet 1793, l’évêque de Québec défend au curé de
solenniser la fête de saint Eustache après « les batailles, les débauches des
années précédentes ». Les paroissiens de Saint−Eustache furent satisfait
du ministère de Benjamin−Nicolas Maillou malgré sa santé débile ;
il subissait de fréquentes attaques de goutte et était devenu infirme.
Considérablement amaigri, il décéda à l’âge de 56 ans et fut inhumé dans le
sanctuaire de l’église.
ALBERTUS MARTIN
Un portrait de Benjamin−Nicolas
Maillou,
conservé à la paroisse
Saint−Eustache, peint par Vital Desrochers, comporte, semble−t−il,
des ressemblances. [a.m.] AAQ, 210 A, I : ff.126, 144, 158* 199, 224, 245 ; II
: ff.3, 73.˙ ANQ−Q, CE1−1, 16 mai 1740, 1er sept. 1750, 29
sept. 1753.˙ AP, Saint−Eustache, Cahiers des délibérations de la
fabrique, 2 oct. 1791 ; Reg. des baptêmes, mariages et
sépultures, 22 janv. 1810. Arch. de l’évêché de Saint−Jérôme (Saint−Jérôme,
Québec), Cartable Saint−Eustache, corr., 22 mars, 18 sept. 1791, 29 août,
11, 23 sept., 20 oct. 1792.˙ Allaire,
Dictionnaire, 1.˙ O.−M. Jouve, Les franciscains et le Canada : aux
Trois−Rivières (Paris, 1934), 263s. J.−E. Bellemare, « Desserte
religieuse des Vieilles Forges », BRH, 24 (1918) : 270.